• À lire aussi : Un employé d’Air Transat tue ses vacances • Lire aussi : Chaos à l’aéroport : retards et annulations même en région • A lire aussi : Chaos dans les aéroports : les hôtesses de l’air vivent un véritable calvaire pendant le vol Le week-end dernier, Air Canada s’est mérité le titre peu enviable de pire compagnie aérienne de la planète. Selon FlightAware, un service qui suit chaque vol dans le monde, le transporteur s’est classé premier pour le nombre de retards, totalisant 700, soit les deux tiers de ses vols. De son côté, l’aéroport Montréal-Trudeau est le sixième au monde pour le nombre de retards et Pearson, à Toronto, est le deuxième seulement derrière Guangzhou en Chine. Mauvaise gestion Mehran Ebrahimi, professeur à l’UQAM Pour l’expert en aviation Mehran Ebrahimi, cette piètre performance n’est pas surprenante compte tenu de la mauvaise gestion du secteur aérien par le gouvernement fédéral. “Personne n’a fait pire que nous dans les pays industrialisés en matière de planification post-pandémique”, a déclaré le professeur au département de gestion de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) lors d’une entrevue avec le journal. Pendant les mois d’inactivité, les compagnies aériennes ont procédé à des licenciements massifs et certains travailleurs ne sont pas revenus. « Nous aurions dû aider les compagnies aériennes à conserver leur personnel et leur expertise. Au lieu de cela, il a fallu plus de 14 mois au gouvernement fédéral pour intervenir, encore une fois très maladroitement. Dans la même période, Air France a touché 9 milliards d’euros, Luthansa a obtenu 14 milliards.” analyse M. Ebrahimi. Alors que la reprise du secteur aérien est plus rapide que prévu, les pénuries de personnel touchent tous les secteurs, des bagagistes aux agents du service client, en passant par les douanes et le personnel de soutien comme ceux qui nettoient les avions. Mais pour le syndicat Unifor, qui représente les agents du service à la clientèle d’Air Canada, le plus grand transporteur du pays pourrait faire plus pour attirer des travailleurs. « Il y avait un problème de pénurie avant la pandémie, mais maintenant il s’est aggravé. Air Canada est vraiment engagée », a déclaré Olivier Carrière, directeur adjoint d’Unifor Québec. Salaires non compétitifs Ces agents qui doivent souvent composer avec la colère des passagers sont embauchés à 16,50 $ de l’heure, trop peu pour gérer le stress dans le contexte actuel. « N’importe quel centre d’appel offre plus que cela. Comment voulez-vous que les gens soient attirés ? se demande-t-il.
Depuis plusieurs semaines, les voyages sont devenus une source de stress pour les passagers en raison du chaos dans les aéroports. Le Canada n’est pas seul dans cette situation, mais comment se compare-t-il aux autres pays? Qu’est-ce qui explique les problèmes actuels ? Le Journal a exploré la question avec des experts.
1 Mauvaise planification des transporteurs canadiens Les transporteurs canadiens ont également leur part de responsabilité dans la situation actuelle avec une planification des vols et un personnel inadéquats. “Ils sont coupables d’avoir publié un programme qu’ils ne peuvent respecter aujourd’hui. Ils sont victimes de leur propre erreur. Ils ont sous-estimé la vague d’aujourd’hui. Quand on prévoit installer autant de capacité, il faut s’assurer d’être en mesure de livrer », estime Jacques Roy, professeur en gestion des transports à HEC Montréal. Air Canada a depuis supprimé 150 vols par jour en été.
2 Une reprise rapide du secteur aérien Au printemps dernier, l’Association internationale du transport aérien (IATA) prévoyait un retour au cadre pré-pandémique… en 2024. Mais d’autres experts pensaient au contraire que la reprise interviendrait bien plus tôt que cela. “J’ai vu une récupération plus rapide, juste en parlant aux gens autour de moi. En hiver, tout le monde voulait aller vers le sud. Il ne faut donc pas s’étonner de voir grossir le flot de personnes voulant partir », a déclaré Jacques Roy, professeur à HEC Montréal.
3 Un effet domino global Londres, Lisbonne, Paris, New York, Chicago… Montréal n’est pas la seule à vivre la situation que l’on connaît à l’aéroport. Chaque petite erreur cause une série de problèmes. A Paris et ailleurs en France, les travailleurs des aéroports sont en grève et réclament des salaires qui suivent le rythme de l’inflation. Toujours à Paris, une panne technique a entraîné, samedi, le départ de 15 vols… sans bagages. À Londres Heathrow, un problème avec le système de carburant de l’aéroport a de nouveau provoqué le chaos le week-end dernier.
4 Manque de personnel dans toutes les professions Par exemple, l’Agence des services frontaliers du Canada compte deux fois moins d’agents dans les aéroports qu’avant la pandémie (de 600 à 300 à Toronto et de 260 à 200 à Montréal). Air Canada fonctionne avec 80 % de son personnel de service à la clientèle. Pour les pilotes, la situation est encore plus dramatique. Selon l’expert en aviation Jean Lapointe, il y aurait 1 200 disparus au Canada, a-t-il confirmé au 98,5 FM. Pendant ce temps, certains employés comme les porteurs travaillent dur pour fournir des services. “Les gens travaillent dur. Tout le monde fait des heures supplémentaires. Et même si les gens ne s’en rendent pas compte, les choses s’améliorent », a déclaré l’un d’eux au Journal hier.
5 Incompétence et laxisme à Ottawa, encore Le gouvernement fédéral, à qui l’on reproche le chaos dans les dossiers des passeports et de l’assurance-emploi, est également pointé du doigt pour le chaos dans les aéroports sous sa juridiction. «Le gouvernement fédéral aurait pu développer des programmes pour garder les pilotes et les contrôleurs au travail, pour avoir une meilleure planification avec les douanes. Nous aurions dû faire comme les Allemands, offrir des programmes de soutien aux travailleurs, les former et investir dans nos infrastructures. Ils étaient tellement détendus, c’est vraiment absurde”, estime l’expert Mehran Ebrahimi. Avez-vous des informations à partager avec nous sur cette histoire ? Vous avez un scoop qui pourrait intéresser nos lecteurs ? Écrivez-nous ou appelez-nous directement au 1 800-63SCOOP.