Posté à 12h00
Alice Girard-Bossé La Presse
Henri Ouellette-Vézina La Presse
« Ça va être un été difficile », dit la Dre Amélie Boisclair, intensiviste à l’Hôpital Pierre-Le Gardeur de Terrebonne. Elle a contracté le COVID-19 fin juin. Une collègue s’était proposée pour la remplacer. « Il venait de travailler 21 jours par mois en réanimation et il a fallu rajouter quatre jours. Si personne ne pouvait me remplacer, je devrais revenir plus tôt », a déclaré le médecin, qui a été isolé pendant 10 jours. Les absences causées par le virus viennent s’ajouter au sous-effectif du réseau. “La charge de travail pour ceux qui vivent à l’étage est plus importante. Nous sommes dans une spirale descendante », a-t-il déclaré. Début juin, la province a enregistré 3 670 absences liées à la COVID-19 parmi les travailleurs de la santé, soit environ la moitié de celles enregistrées aujourd’hui. “Ce sont des indicateurs qui vont dans la mauvaise direction et que nous sommes au début d’une nouvelle vague”, explique le Dr Donald Winn, infectiologue et microbiologiste au Centre universitaire de santé McGill.
Un système fragile
Dr. Vinh s’inquiète de l’état du système de santé. « Lorsque les agents de santé sont refusés parce qu’ils sont malades, le système devient encore plus fragile. C’est comme un jeu de Jenga. On essaie de déplacer les blocs sans que tout tombe, notamment en affectant du personnel. Mais un jour, la tour tombera”, explique-t-il. L’infectiologue affirme que le personnel de santé “est épuisé mentalement et physiquement”. “En plus, il leur faut parfois rater leurs vacances pour combler les vides”, dit-il. ajoute le Dr Joseph Dahine, intensiviste à l’hôpital Cité-de-la-Santé de Laval. “On a de la chance qu’il fasse beau, qu’il y ait longtemps du soleil, ça aide au moral. Mais si cela gâche les vacances de tout le monde et aggrave la chute, ce ne sera pas une bonne nouvelle. C’est ce dont j’ai peur”, a-t-il déclaré.
“Un beau défi”
Pour le Dr Matthew Oughton, infectiologue à l’Hôpital général juif, les absences accumulées dans le réseau de la santé représentent un défi majeur à l’heure où les taux d’occupation sont gonflés dans plusieurs secteurs de la métropole, dont des secteurs essentiels comme l’hôpital Maisonneuve-Rosemont ou le Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM). « Plus il sera difficile pour les gens de travailler dans le réseau de la santé, plus il sera compliqué de retenir les employés et d’en attirer de nouveaux. Et c’est ce qu’on constate depuis un moment : on perd de bons employés, au lieu de les embaucher », s’inquiète le Dr. Oughton. Ce qui se passe, dit-il, “c’est quand même une pression sur un système qui fonctionne à bas niveau”, dit encore l’expert. Il rappelle aussi au passage que la forte transmission du virus dans le réseau “reflète nécessairement la transmission communautaire du COVID-19”, également très présente dans la population. Je le dis et le répète : c’est pourquoi il devient urgent de relancer les tests PCR dans l’ensemble de la population, pour avoir une meilleure image de la situation. L’analyse des eaux usées ne suffit pas. Dr Matthew Oughton, spécialiste des maladies infectieuses à l’Hôpital général juif Au CUSM, les travailleurs de la santé absents ne semblent pas avoir contracté la COVID-19 pendant leur séjour à l’hôpital, a déclaré le Dr Vinh. “Il n’y a pas d’épidémie, cela suggère donc que des agents de santé ont été infectés dans la communauté”, a-t-il déclaré. Cette situation semble être généralisée dans tout le réseau de la santé. « Les travailleurs de la santé sont des citoyens comme tout le monde, alors ils vont au restaurant et utilisent les transports en commun. Ils sont très conscients des risques, mais on ne peut pas leur demander de s’isoler complètement”, explique le Dr Beuschler.
COMMENCER L’AUGMENTATION DES DÉCÈS
La transmission communautaire continue également de se faire sentir dans la province. Le Québec a fait état de 20 nouveaux décès mardi, soit une augmentation de 67 % en une semaine. Le Québec signale également une augmentation de 147 hospitalisations depuis samedi. Les 1 441 personnes actuellement hospitalisées représentent une augmentation de 18 % au cours d’une semaine. En réanimation, les 39 patients représentent une augmentation de 8% sur une semaine. Cependant, le Premier ministre François Lego a déclaré mardi “qu’il ne faut pas s’attendre à une augmentation significative” des cas de COVID-19 cet été. Le Québec, cependant, sera particulièrement attentif au mois de septembre, “lorsque les enfants retourneront à l’école”. Avec Pierre-André Normandin et William Thériault, La Presse et La Presse Canadienne